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De 1840 à nos jours
Histoire & évolution 

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La Bataille d'Orthez

En 1808, Napoléon chasse les Bourbons de Madrid et place sur le trône espagnol son frère Joseph. C'est là une décision funeste. Une guérilla sanglante met à mal les troupes françaises. Joseph doit quitter Madrid poursuivi par les troupes de Wellington qui, débarquées au Portugal, remontent en Espagne pour infliger une sévère défaite aux Français à Vitoria en juin 1813.

Cette défaite est décisive pour l'avenir de Pau.

L'armée anglaise franchit la Bidassoa, occupe le pays basque et se dirige vers l'est. Le 27 février 1814, sur les hauteurs d'Orthez 45 000 soldats anglais se trouvent face à 32 000 soldats français, commandés par Soult.

La victoire que remporte Wellington lui ouvre la route de Toulouse et de tout le Sud-Ouest.

(Extrait de l'ouvrage "Le Cercle Anglais").

Les prémices de la chasse à courre

Le 18 mai 1814, les armées de Wellington sont à Pau.
La ressemblance des landes béarnaises et de leurs terres natales incite bien vite les officiers de la cavalerie britannique à y pratiquer leur sport favori : la chasse au renard.

La paix revenue nombre d'entre eux conquis par la douceur de vivre en Béarn reviennent s'y établir.

Le Béarn a eu longtemps le privilège de conserver le seul équipage de chasse au renard, le "Hunting", de tradition anglaise et irlandaise, le "Pau Hunt Drags". L'histoire de cet équipage aujourd'hui unique en Europe continentale se confond avec celle de ses "Masters" et des grands cavaliers qui y participèrent.

1840 - Le Pau Hunt Drags

Le colonel White et Sir Henry Oxenden à leur tête, ils forment équipage : le Pau Hunt Drags est né
et la guerre est déclarée aux renards du pays.

Lord Oxenden le fondateur fut comme toute la colonie anglaise séduit par le paysage béarnais qui lui rappelait non pas l'Angleterre comme on le dit trop souvent mais le sud de l'Irlande, région très propice à ce sport d'obstacles qu'est la chasse au renard. Comme en Irlande du Sud les landes paloises de l'époque, plantées de touyas garantissaient la souplesse parfaite du sol, jamais marécageux, jamais gelé. 

En outre les petites propriétés béarnaises étaient fermées par des talus, véritables petits murs de terre entourés de fossés, qui constituaient de remarquables obstacles naturels. Les paysans quant à eux étaient ravis d'être débarrassés des renards qui pullulaient. Convaincu qu'il fallait profiter au plus tôt de ces avantages. Lord Oxenden fit venir de superbes chevaux anglais et une meute de fox hounds et c'est ainsi que le Pau Hunt Drags commença ses activités.

Le malheur voulut que la passion que le master portait à sa femme fut plus violente que celle que la chasse lui inspirait. Lorsque Lady Oxenden mourut en 1842 son mari ordonna l'abattage des chevaux donnés en pâture à la meute qui devait être elle aussi exécutée après ce festin. Dupont le malheureux piqueux qui reçut cet ordre n'eut pas le courage d'aller jusqu'au bout de son geste. Il sauva douze couples de chiens. Grâce à eux le Pau Hunt put revivre et Dupont le servit jusqu'à sa mort.

Les Masters qui succédèrent à Lord Oxenden partagèrent son goût pour le Béarn mais ils découvrirent très vite que les chasses devaient s'arrêter à la fin mars au risque de voir les chevaux contracter en cas de chaleur la fièvre des touyas.

Sous le Second Empire le Pau Hunt était définitivement lancé. Il accueillit dès ce moment-là des invités de marque comme le Duc de Hamilton à qui Napoléon III prêtait le château de Pau afin qu'il y puisse traiter honorablement ses invités. (Pau Cheval et tradition)

Cependant le Pau Hunt connait une grave crise en 1880. le comte de Bari, fils du dernier roi des Deux Siciles, Ferdinand II, s'installe à Pau en 1879. Il monte sa meute et organise ses propres chasses, deux fois par semaine, faisant concurrence au Pau Hunt, à tel point qu'en avril 1880, le master John Stewart démissionne et que la Société est dissoute. Conscient du préjudice que pouvait porter à la saison touristique cette situation, Monsieur de Monpezat, maire de Pau, fait prendre en charge par la ville les frais de personnel et l'entretien de la meute en attendant une solution. 

Gordon Bennett le propriétaire du New York Herald Tribune, débloque la situation. Il arrive en gare de Pau le 30 novembre. A l'issue d'une réunion à l'Hôtel de ville avec le comte de Bari, les deux membres fusionnent. Le Pau Hunt est reconstitué et Gordon Bennett devient master intérimaire : il prend en charge les dépenses de l'équipage.

Le 5 décembre, il préside le meet aux Allées de Morlaàs. Les soixante-dix cavaliers présents s'élancent depuis Andoins. A la fin de ce run, seulement dix restent en selle dont Gordon Bennett à qui est remis le brush (queue du renard). (Le Cercle Anglais)

Quelques Masters mis à l'honneur

Il est impossible de rendre hommage à tous ces maîtres d'équipage. Il faut simplement noter qu'ils furent d'abord anglais puis américains. Un français obtint enfin ce titre de 1893 à 1896, le baron Lejeune officier des Haras. Il contribua à calmer la timidité des Béarnais qui craignaient et se moquaient du snobisme de la colonie anglaise. De 1896 à 1899, ce fut au baron d'Este d'être Master, son scrapbook (à découvrir partiellement ci-dessous) témoigne de toutes les activités de la vie sportive à Pau et des rendez-vous de chasse du Pau Hounds, qu'il avait soigneusement découpé et composé sur plus de cinq cent pages !
Ce document si précieux est une pépite d'informations historiques !

On appréciait certes la générosité de M. H. Ridway Master en 1901 mais on souriait en contemplant les gigantesques écuries qui jouxtaient sa villa Sainte-Hélène et qui se voulaient une réplique de celles de Chantilly.

N'est pas Condé qui veut disait-on mais ce n'était finalement qu'ironie superficielle. En tout cas les Béarnais avaient désormais une place dans l'équipage, modeste par le nombre mais néanmoins des plus brillantes. Nul ne contestait en effet que le baron de Palaminy ne fut le meilleur cavalier du Pau Hunt et que sa sœur Marion de Palaminy ne puisse rivaliser avec les amazones anglaises.

F.H. Prince et Henri de Vaufreland

Les susceptibilités semblaient tout à fait calmées lorsque F.H. Prince, industriel américain, devint Master du Pau Hunt en 1901. Il allait le demeurer trente ans. Sa fortune considérable lui permettait d'entretenir une écurie exceptionnelle dont ses amis profitaient pour chasser à ses côtés et de recevoir tous les samedis pendant la saison, l'équipage au grand complet, en tenue de soirée "habit rouge" de rigueur pour les Messieurs : Edouard VII, le prince Henry, Alphonse XIII et nombre d'archiducs profitèrent ainsi de son hospitalité. Il était secondé dans ses fonctions par son Joint Master, un anglophile fort distingué le vicomte Henri de Vaufreland. Celui-ci contribua par son aimable disponibilité à faire tomber les derniers préjugés qui séparaient encore les sportmen anglo-américains de leurs homologues français. F.H. Prince fit tant pour la renommée de la ville que le maire de Pau, Alfred de Lassence s'écria un jour : "Mon cher Master nous vous élèverons une statue à côté de celle d'Henri IV".

F.H. Prince, lucide, répondit avec un fort accent américain : "Oui mais en plou petit".

Peu de temps après, il eut la douleur de perdre son fils Norman, mort pour la cause alliée dans les rangs de l'escadrille Lafayette. Une avenue de Pau porte aujourd'hui son nom.

1920-1934

Dans les années vingt, le Pau Hunt connut son apogée... Les écuries du Master abritaient plus de cent chevaux irlandais et anglo-arabes, pour permettre la remonte d'une soixantaine de boutons anglais et américains dans leur grande majorité. A ces derniers se joignaient régulièrement des grands noms d'Espagne en villégiature à Saint-Sébastien. Le prince de Galles et les Infants d'Espagne honorèrent à plusieurs reprises l'équipage de leur présence.

Cependant dans les trente ans du Mastership de F.H. Prince la physionomie des chasses avaient quelque peu changé bien que l'on fut resté très discret sur le fait que le plus souvent au lieu de chasser des renards du pays on ait eu recours au système des drags déjà pratiqué en Angleterre, en Irelande et aux Etats-Unis.

Le drag, parcours d'équitation derrière une meute se termine par un lâcher de renards. Soulignons qu'à cette époque également le Pau Hunt fit un émule par la création sur la Côte Basque d'un équipage voisin le Biarritz Fox Hunt. De fréquentation anglo-saxonne celui-ci ne devait pas survivre à la disparition de son Maître en 1934.

Nombreux sont les Palois qui ont gardé la nostalgie de ces gentlemen se rendant aux dîners du Master à la villa Sainte-Hélène en frac aux couleurs du Pau Hunt.

1939-1940

Le Master F.H. Prince et la colonie étrangère quittent Pau. La réquisition des chevaux et l'occupation ensuite obligent le Pau Hunt à démonter.

Vidéo : Pireneas Bibliothèque 

Film ancien de René Pérony, conservé à la Bibliothèque Patrimoniale de Pau. 1939. Cote F-6-1.
Description matérielle : Pellicule souvent abîmée, de très nombreuses rayures et taches. Muet.

1946

Cependant dès 1946 deux cavaliers palois fort connus des milieux hippiques Henri Horngren etPaul Larregain relèvent le défi et commencent à animer des "Travers Pays" dans les environs de Pau.

1947

Malgré ses 92 ans, F. H. Prince traverse une dernière fois l'Atlantique pour remettre le flambeau au marquis du Vivier. Celui-ci avec dévouement et générosité remonte l'équipage. Ce dernier ne sera plus anglais et l'on ne verra plus les fastes d'antan, mais les talus sont toujours là et la tradition est sauvegardée.

Le nouveau Master était assisté dans ses fonctions par ses deux Joint Master successifs, les palois
Henri Horngren et Robert Nancy. Ces hommes eurent le grand mérite de maintenir la tradition dans une période cruciale pour l'équipage. Il fut alors décidé dans un souci de discrétion de porter la tenue dite des petites chasses, veste noire à parement vert forêt.

La meute ne comprenait plus que sept anglo-français réformés des équipages Verne et Loubet.

Le premier rendez-vous de chasse fut alors fixé le 17 mars 1947 à la maison de garde forêt du Bastard.

Il ne manquait pas d'allure. Autour du Master Renaud du Vivier et du Joint Master Henri Horngren se tenaient Madame du Breil, superbe en amazone, Madame Horngren qui porta haut les couleurs de la Suède dans les concours hippiques internationaux et sa fille, la spirituelle comtesse de Navailles

Le mois suivant la mairie de Pau réinstalla le chenil de la meute dans le domaine de Berlanne.

De 1960 à 1975

En 1960, le marquis du Vivier transféra ses fonctions et sa charge de Maître d'Equipage au baron Jean d'Ariste. Ce dernier, béarnais au cœur généreux et au verbe haut, allait donner au Pau Hunt une impulsion nouvelle. L'équipage va s'ouvrir à tous les amateurs d'équitation sportive de la région et en particulier aux jeunes des Clubs hippiques. L'équipage comptera bientôt une trentaine de Boutons.

 

Le rayonnement, la notoriété, la connaissance du monde agricole du nouveau Master vont lui permettre d'établir un dialogue amical avec les communes rurales et leurs sociétés de chasse, afin d'étendre les territoires de l'équipage. Il lui reviendra le grand mérite d'avoir inscrit le Pau Hunt dans le cadre du patrimoine sportif et traditionnel de la région et de l'avoir fait accepter comme tel. Il fut aidé dans sa tache par deux Joint Master enthousiastes Gustave Cieren et Henri Legrand.

En 1969 renouant avec une habitude vieille du siècle dernier, l'équipage se déplace, non pas en Angleterre, mais en Irelande, cette fois. Il couple durant trois semaines sur la voie du renard, avec des équipages irlandais, le "Black and Tan", le "Wicklow Fox Hunt" et le "Tipperary Fox Hunt". Si le Pau Hunt ne rappelait que de lointains souvenirs à de vieux Masters irlandais, nos Boutons firent néanmoins très bonne figure sur les talus du Comté de Cork et devant les fossés impressionnants du Limerick.

De 1976 à 2000

Interdit d'équitation par la faculté, le baron d'Ariste doit la mort dans l'âme se résigner à transmettre son fouet, le 4 novembre 1976 à l'un de ses Boutons béarnais comme lui Georges Claverie qui deviendra, à 39 ans, le 28 ème Master du Pau Hunt. Secondé par l'amitié sans faille, la disponibilité et les compétences de son Joint Master Raymond Beziat et des membres de son comité Patrick Barthe, Bernard Baylac, Bernard Burrus et Georges Moutet

Georges Claverie se fixera trois objectifs.

Renouer avec certaines traditions, maintenir sinon améliorer la qualité sportive des drags de l'Equipage et amener au Fox Hunting un nombre croissant de jeunes cavaliers, pépinière du Pau Hunt de demain.

C'est pour remplir le premier de ces objectifs qu'il fera reprendre en 1978 la tenue rouge à l'anglaise qui se marie si bien aux couleurs de la campagne béarnaise et qu'il veillera depuis avec une courtoise mais ferme autorité aux maintiens des usages à la tenue de ses cavaliers et au respect de l'environnement rural.

De 2000 à nos jours

Le Pau Hunt est toujours installé dans la propriété́ de Berlanne, avec un chenil historique construit pour
3 meutes.  Cette propriété a été cédée en 1890 par madame Torrance à la ville de Pau, en souvenir de son fils décédé lors d’un « point to point », sous la condition que l’équipage du Pau Hunt y soit maintenu.

Comme une maison mise hors d’eau, en attendant des jours meilleurs, la vieille tradition au Pau Hunt plie mais ne rompt pas… 

 

L’équipage de drag connait aujourd’hui un regain de vitalité porté à la fois par la redécouverte d’une équitation sportive en plein air, qui pousse les cavalières et cavaliers à sortir du confort des manèges,
mais aussi par la nature même du « drag ». 

C’est le mérite aujourd‘hui d’une nouvelle génération de cavaliers : non seulement de continuer à arpenter nos campagnes à cheval mais aussi d’avoir pris pleinement en compte le volet culturel et environnemental de cette activité (le plus jeune membre à vingt ans).

Comme l'écrivait le Baron d'Ariste, Master du Pau Hunt de 1959 à 1976, "si dans la vénerie française l'on monte à cheval pour chasser, le Pau Hunt chasse pour monter à cheval"

… et c’est là que le mot « chasse » est partiellement usurpé, car il n’y a pas de gibier !

 

Si nous devions donner trois caractéristiques au Pau Hunt

- on ne s’y ennuie jamais (obstacles et paysages sont assurés).

- chaque sortie est un événement populaire qui, s’il est codifié (règles de conduite, tenue), reste festif pour les invités à cheval ou les spectateurs à pied … ici on n’est pas snob, et chaque chasse se finit par un solide repas dans ces auberges chères à Cecil Aldin et Harry Eliott.

- il  n’y a là que le plaisir de voir travailler la meute et la communion cheval-cavalier.

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